À voir la quantité et la qualité des footballeurs épinglés par le fisc espagnol, on serait tenté de composer une équipe. De l’ex-gardien du Real Madrid Iker Casillas, qui a déjà payé 2 millions d’euros après une différence d’appréciation, aux deux plus grandes stars mondiales de l’attaque, Cristiano Ronaldo au Real, accusé d’une fraude de 14,8 millions, et Lionel Messi au Barça, condamné à 21 mois de prison avec sursis. Sans oublier en défense Pepe, le latéral gauche Fabio Coentrao, eux aussi mis en cause, ou le milieu défensif Javier Mascherano, condamné à un an avec sursis. Pour compléter l’attaque, le Monégasque et ex-Atlético Radamel Falcao, accusé de soustraire 5,6 millions au fisc, fera bien l’affaire, associé au Parisien et jadis Madrilène Ángel Di María, qui a accepté ce mercredi la proposition du procureur d’une condamnation à un an de prison avec sursis et le paiement de 2 millions d’euros.
La liste complète dépasse largement les onze joueurs nécessaires pour monter l’équipe imaginaire du F.C. Fraude fiscale. Au poste d’entraîneur, on ne saurait rêver meilleur tacticien que José Mourinho, accusé formellement par le parquet espagnol d’avoir omis de payer 3,3 millions d’euros aux impôts.
À chaque fois, le montage financier contesté par le fisc est organisé autour des droits d’image. À partir de 1996, le Code fiscal espagnol permettait aux joueurs de percevoir jusqu’à 15 % des sommes payées par le club en droits d’image plutôt qu’en salaire. Un avantage conséquent pour les sportifs: le taux moyen d’imposition sur les revenus fluctuait pour ces sommes autour de 50 %, tandis que l’impôt sur les sociétés plafonnait à 30 %. Les joueurs ont donc été encouragés à ouvrir des sociétés. Mais, à partir de 2006, le fisc exige que ces sociétés aient une activité économique réelle, faute de quoi les droits d’image seront considérés comme des salaires et imposés comme tels.
«En vérifiant l’activité de ces sociétés, le fisc s’éloigne de l’esprit de la loi de 1996, pensée pour alléger la fiscalité et attirer des joueurs étrangers, reconnaît Salvador Ruiz Gallud, directeur du département fiscal de la société de conseil Equipo Económico. Mais il est vrai aussi que les footballeurs ont abusé de ces sociétés, en les installant dans des paradis fiscaux pour dissimuler une partie de leurs revenus.»
L’affaire Messi en est un bon exemple. Les droits de la star argentine étaient cédés à des sociétés au Bélize, au Royaume-Uni, en Uruguay et en Suisse. Quant à Cristiano Ronaldo, ses droits sont gérés par la société Tollin Associates, installée aux îles Vierges britanniques, et dont l’unique objet semble être de les revendre à une entreprise irlandaise qui exploite effectivement l’image du Portugais.
«Pratique légale»
Selon Gestifute, l’entreprise de l’agent Jorge Mendes, qui gère les intérêts de Ronaldo, «Tollin a été ouverte en territoire britannique pour percevoir les droits d’image de Cristiano quand il jouait à Manchester». Gestifute défend la légalité de la pratique: «Les footballeurs étrangers sont considérés en Espagne comme non-résidents fiscaux pendant les cinq premières années de leur implantation. En 2014, cinq ans après son arrivée au Real, la société a été dissoute et Cristiano a déclaré ses impôts comme n’importe quel autre résident en Espagne.» Le joueur devra défendre son innocence devant le juge, qui l’a convoqué à comparaître le 31 juillet prochain.
Fuente: Le Figaro